QUEL AVENIR POUR LA PAPOUASIE ?


Introduction

D'un point de vue anthropologique, sociologique et culturel, les Papous se considèrent comme des hommes : pleinement humains et libres. Les tribus papoues utilisent les termes suivants pour se désigner : Nit Akhuni (Hubula de Wamena), Amungme - Kamoro (Timika), Mee (Paniai) Anim-ha (Merauke), etc.

Depuis des milliers d'années, chacune de ces tribus exerce des pouvoirs gouvernementaux indépendants tout en entretenant des relations politiques et commerciales avec les autres tribus. Depuis des milliers d'années, les Papous ont prouvé qu'ils étaient capables d'autodétermination, d'indépendance et de souveraineté sur leur terre. Ils savent ce qu'il leur est permis de faire et de ne pas faire. Ils sont convaincus qu'existe une interdépendance entre l'homme, l'univers et les esprits ancestraux. Ils croient aussi profondément en un Dieu Créateur.

La Papouasie compte 300 tribus et des milliers de sous-tribus. D'une manière générale, les experts classent l'ensemble de la Mélanésie en 13 territoires indigènes : 6 en Papouasie-Nouvelle-Guinée et 7 en Papouasie occidentale. Il s'agit des régions de Tabi (Mamta, Dafonsoro ou la côte nord), de Saireri (Sairera, Geelvink Bay), de Ha-Anim (Sud Pantani), de Lani-Me Paqoo (Pegoo), de Lani-Me Peqoo (Pegoo), de Sepik, de Huon et d'Oroko. De nouvelles données ont été ajoutées pour les régions coutumières de Chimbu, de Mendu, ainsi que des îles mélanésiennes.

Après avoir subi colonisation après colonisation pendant plus d'un siècle, les Papous sont confrontés au défi de maintenir leur identité. Cependant, une chose est sûre : ils ne seront jamais néerlandais ou indonésiens, ni même européens ou asiatiques.

De même que tous les pays colonisateurs ont un plan pour leurs colonies, les Pays-Bas et l'Indonésie ont une feuille de route pour la Papouasie occidentale. Mais avant d'entrer dans le vif du sujet, permettez-moi d'expliquer brièvement, l'histoire de l'interaction des Papous avec le monde extérieur. 


Les Papous en contact avec l'étranger

La Papouasie est restée une région isolée jusqu'au début du 20e siècle. Cependant, son existence était connue du monde antique : au deuxième siècle, le géographe gréco-romain Claude Ptolémée l'a cartographiée sous le nom de Labadios. 

La premier contact fut initié par les commerçants chinois au 8e siècle. Ceux-ci ont surnommé les Papous "Senkis". En 724, les chroniques impériales chinoises ont fait état de la réception d'une femme noire, offerte par un envoyé royal de Srivijaya. Certains historiens supposent que cette femme était mélanésienne. 

Au 10e siècle, les commerçants arabes sont arrivés. Ils désignaient les Papous sous le nom de sanjis. Ce terme a la même signification que Jangge ou Zangge qui, en javanais, désigne les personnes à la peau noire. Dès lors, les activités commerciales se multiplièrent dans la région, notamment avec les royaumes de l'archipel indonésien, comme Srivijaya de Sumatra et, plus tard, Majapahit de Java. 

À la fin du XVe siècle, la pointe occidentale de la Papouasie fut convoitée pour la muscade. Cette denrée était si précieuse qu'elle suscitait la convoitise des sultans moluquois de Tidore et de Ternate. Le commerce des épices a atteint son apogée avec l'arrivée des Européens, Portugais et Espagnols en tête, au début du XVIe siècle. En 1511, Antonio d'Arbau, un marin portugais, a appelé la région de Papouasie "Os Papuas" ou llha de Papo.

Jusqu'à la fin du XIXe siècle, les étrangers ne vivaient que temporairement en Papouasie. Ce n'est qu'en 1895 que la Papouasie est entrée dans l'ère coloniale. A la suite du traité de La Haye, le territoire Papou fut divisé en trois parties : l'ouest appartenait aux Pays-Bas, le nord à l'Allemagne et l'est à la Grande-Bretagne. A la fin de la Première Guerre mondiale en 1918, le nord de Papouasie, ancienne colonie allemande, fut cédé à la Grande-Bretagne. 


Colonisation Néerlandaise

Le 24 août 1828, les Néerlandais ont marqué leur territoire en construisant le Fort Du Bus dans la baie de Triton à Kaimana. En 1875, le gouvernement néerlandais a officiellement enregistré la Nouvelle-Guinée (Papouasie occidentale) en tant que colonie avec une frontière nord de 14,47 est et une frontière sud de 141 est. Cette revendication était axée sur des missions commerciales et économiques.

Jusqu'à la fin du XIXe siècle, les activités néerlandaises se limitaient à des expéditions et à des recherches. En 1910, une nouvelle ville appelée Hollandia fut construite. Elle deviendrait plus tard Port Numbay ou Jayapura, capitale de la Papouasie. Cependant, on peut dire que les activités du gouvernement néerlandais au début du XXe siècle étaient très faibles voire presque invisibles. L'éducation et les services de santé étaient principalement assurés par des missionnaires, catholiques et protestants. Ce n'est qu'en 1944 que la Papouasie est devenue une colonie de peuplement. 

Cette nouvelle politique coloniale avait trois objectifs :

1. Réinstaller des colons Néerlandais et des Indo-Néerlandais fuyant l'Indonésie.

2. Endiguer la propagation du communisme en provenance de l'Union soviétique et de la Chine. 

3. Préparer les Papous à une indépendance pacifique. 


En 1949, J.P.K. van Eechoud fut nommé administrateur de la Papouasie. Depuis lors, un certain nombre de dirigeants papous ont occupé des postes importants au sein du gouvernement provincial de la Nouvelle-Guinée Néerlandaise. Deux ans plus tard, sous la direction du gouverneur Waardenburg, un plan directeur fut élaboré pour les 20 prochaines années. 

Celui-ci était divisé en deux phases : 

1. Formation des cadres éducatifs et professionnels (1951 à 1961) 

2. Formation de l'élite politique papoue (1961 à 1970) dans le but d'atteindre l'indépendance totale en 1971.


Cependant, à partir de 1958, les demandes d'indépendance se sont multipliées. Cela a conduit à la reconnaissance de la souveraineté Papoue par les Pays Bas, le 1er décembre 1961.


Colonisation Indonésienne 

Dès leurs premières interactions avec le monde extérieur, les Mélanésiens de Papouasie ont compris qu'ils ne faisaient pas partie de l'Indonésie.

Aux XVIe et XVIIe siècles, les hommes des sultans de Tidore et de Ternate capturaient souvent des Papous indigènes pour les exploiter comme esclaves. Dans l'intérêt de ce commerce scandaleux, des commerçants musulmans avaient commencé à s'installer à Fak Fak en 1606. Ceux-ci cherchaient également à contrôler le commerce des épices, la pointe de la Papouasie occidentale étant riche en noix de muscade, une denrée fortement appréciée à cette époque.

La domination du sultanat de Tidore et ses politiques racistes ont laissé de profondes blessures dans la mémoire collective des Papous jusqu'à aujourd'hui. Malgré cette injustice, les Papous ont rendu de grands services au sultan de Tidore. Cela a été particulièrement vrai pendant la guerre de Nuku contre la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC) à la fin du 18e siècle.

Un phénomène similaire s'est produit pendant l'occupation indonésienne : grâce aux athlètes papous, l'Indonésie a remporté un certain nombre de compétitions sportives internationales, en particulier des matchs de football asiatiques. Les musiciens et chanteurs papous, tels que les Black Brothers, ont fait la fierté de l'Indonésie. Ils étaient connus en Europe dans les années 1970.

Le 19 décembre 1961, l'Indonésie, sous la présidence de Sukarno, a déclaré la guerre à la Papouasie, devenue indépendante trois semaines auparavant. C'était une étrange ironie, car, dans les années 1930, les Papous avaient accueilli les militants indépendantistes indonésiens, exilés par les Néerlandais. Parmi eux, Mohammad Hatta, principal collaborateur de Sukarno.

Les Nations unies, sous l'impulsion des États-Unis, ont facilité l'occupation indonésienne de la Papouasie le 1er mai 1963 : voilà encore une étonnante ironie, car pendant la Seconde Guerre mondiale, les Papous ont aidé les forces américaines du général MacArthur à combattre les Japonais sur l'île de Biak en 1944. Cette bataille a été décisive pour la victoire des Alliés dans la guerre du Pacifique.

Depuis 1963, les militaires indonésiens n'ont cessé de commettre diverses formes de violence à l'encontre des indigènes papous. Environ cinq cent mille Papous ont perdu la vie au cours de ces soixante dernières années. L'Indonésie semble n'avoir qu'un seul programme : exterminer les Papous et extraire les ressources de la Papouasie autant que possible. En effet, les richesses naturelles de la Papouasie sont quasi-illimitées : le pétrole, le gaz, l'uranium, l'or, le cuivre, le bois, etc. y sont abondants. Les projets de développement entrepris par Jakarta, avec son doux jargon tel que l'autonomie spéciale, ne sont qu'un prétexte pour dissimuler ces crimes.


Quel avenir pour les Papous ?

Le sort du peuple papou est en suspens depuis plus d'un siècle. Le temps est venu de prendre position et de tirer les leçons de notre passé amer, rempli de larmes et de sang. Avec l'Indonésie coloniale, nous, Papous, périrons. Avec l'Occident capitaliste, nos souffrances ne cesseront jamais. Quelle est donc la solution ? Nous n'avons pas d'autre choix que de retourner dans le giron mélanésien.

Nous devons être nous-mêmes, fiers de ce que nous avons et de ce en quoi nous croyons. C'est pourquoi j'appelle la jeune génération de Papous à ne pas avoir peur de se battre.  Ils n'ont pas besoin de prendre les armes, il leur suffit de prendre un stylo et d'écrire sur ce qu'ils vivent, voient et ressentent. La meilleure arme que l'esprit a contre la tyrannie est la plume. Sans diminuer mon respect pour Egianus et ses amis qui mènent une guérilla dans les forêts, j'appelle tous les Papous à se battre pacifiquement.

Je demande aux étudiants et aux intellectuels d'être patriotes. Ils sont les ambassadeurs de la nation papoue, tant en Indonésie qu'à l'étranger. Ils doivent continuer à parler au monde des souffrances de leur peuple et de ses aspirations à l'indépendance.

Depuis la création du Mouvement uni de libération de la Papouasie occidentale (ULMWP), la feuille de route de la nation Papoue est claire. Nous construirons un nouvel axe : Mélanésie - Pacifique - Caraïbes - Afrique. Certes, le chemin à parcourir est encore long. Mais avec Dieu, nous gagnerons sûrement. Avançons et ne reculons jamais . Waa... waa... waa...




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