Vers une diplomatie éthique : la visite de Macron en Indonésie à l’épreuve des droits humains en Papouasie occidentale
Vers une diplomatie éthique : la visite de Macron en Indonésie à l’épreuve des droits humains en Papouasie occidentale
Un appel à la conscience chrétienne dans la gestion des affaires internationales
À la fin du mois de mai 2025, le président Emmanuel Macron effectuera une visite d’État en Indonésie. Ce déplacement s’inscrit dans une stratégie de renforcement du partenariat bilatéral autour de la défense, des investissements industriels et de la sécurité maritime. Mais une question fondamentale devrait interpeller tout chrétien : la France peut-elle conclure des accords militaires majeurs avec un pays accusé de violations graves des droits humains, sans renier ses valeurs ?
Depuis des décennies, la Papouasie occidentale, intégrée à l’Indonésie dans des conditions contestées, est le théâtre de violences, de discriminations systémiques et d’un déni persistant du droit à l’autodétermination. Selon Amnesty International, entre 2014 et 2022, au moins 95 personnes ont été tuées illégalement par les forces indonésiennes sans qu’aucune responsabilité ne soit établie. Plus de 85 000 civils ont été déplacés à cause des opérations militaires dans les zones de résistance papoue. Derrière ces chiffres, ce sont des vies humaines, des familles, des communautés entières réduites au silence.
Peut-on, en tant que chrétiens, ignorer cette souffrance sous prétexte de « realpolitik » ? Le commerce des armes ne saurait être une zone d’ombre éthique. La France prévoit de livrer à l’Indonésie 42 avions Rafale et plusieurs sous-marins pour un montant supérieur à 8 milliards de dollars. Or, en tant que signataire du Traité sur le commerce des armes, notre pays a l’obligation morale de ne pas exporter du matériel susceptible d’être utilisé contre des civils.
La doctrine sociale de l’Église est sans ambiguïté : la paix ne peut être construite que sur la justice, la solidarité et le respect de la dignité humaine. Comme l’enseignait 'Gaudium et Spes', il est vain de parler de paix quand les droits les plus élémentaires sont bafoués. Le pape François, dans 'Fratelli tutti', nous rappelle que le silence face aux injustices est une forme de complicité. Le dialogue entre nations n’a de sens que s’il intègre la voix des opprimés, et pas seulement celle des puissants.
Il est temps que la diplomatie française ose une parole prophétique. La grandeur d’un État ne se mesure pas seulement à ses contrats signés, mais à sa capacité à refuser l’indifférence. Et la grandeur d’un dirigeant réside dans son courage à défendre la justice, même au prix de ses intérêts immédiats.
Les chrétiens de France, les Églises, les intellectuels et les citoyens engagés ont ici un rôle à jouer : celui d’éveiller les consciences et de rappeler qu’il ne peut y avoir de paix durable sans vérité, ni de partenariat sincère fondé sur la négation d’un peuple. Il ne s’agit pas d’idéalisme naïf, mais de fidélité à l’Évangile.
La visite du président Macron pourrait être l’occasion de poser un geste fort : demander publiquement des garanties sur la situation des droits humains en Papouasie, rencontrer des représentants des communautés papoues, et réaffirmer que la France ne saurait être complice de répressions contre des peuples oubliés.
Ne transformons pas la fraternité en slogan vide. Osons une diplomatie enracinée dans l’Évangile, où la justice prime sur les contrats, et la dignité sur les calculs. C’est à cette condition seulement que la France pourra encore parler au nom des droits de l’homme. Et c’est à cette condition que notre foi chrétienne garde toute sa crédibilité dans la sphère publique.
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