Papouasie occidentale : un peuple qui frappe à la porte de la justice

Le 1er mai 2023, le peuple papou commémorait soixante années d’une occupation indonésienne marquée par la violence, l’injustice et le silence de la communauté internationale. 

Cette date, lourdement symbolique, invite les chrétiens du monde entier à regarder avec vérité et compassion la souffrance persistante d’un peuple oublié, en quête de justice et de reconnaissance.


Soixante ans d'oppression

Depuis l’intégration forcée de la Papouasie occidentale à l’Indonésie en 1963, les Papous ont été soumis à une série ininterrompue de violences étatiques : bombardements, déplacements forcés, tortures, exécutions extrajudiciaires, marginalisation systémique. Le fameux "Acte de libre choix" de 1969, qui aurait dû refléter la volonté du peuple papou, n’était en réalité qu’un simulacre orchestré sous contrainte militaire.

Malgré la ratification par l’Indonésie de multiples conventions internationales sur les droits humains, la réalité sur le terrain en Papouasie demeure tragique : discriminations raciales, militarisation, exploitation effrénée des ressources naturelles, et une immigration massive menaçant l'existence même des Papous en tant que peuple distinct.


Un cri pour la dignité

Au cœur de cette détresse, les Papous ne réclament pas vengeance, mais reconnaissance. Leur cri est un appel à la dignité, à la vérité, à la justice. Ils réclament, comme tout peuple, le droit fondamental à l’autodétermination — ce droit que reconnaît la Charte des Nations unies, et que proclame aussi, en creux, notre foi chrétienne.

Car l’Évangile, loin d’être indifférent à la souffrance des peuples, porte un message clair de libération et de restauration. Le Christ lui-même proclame : « Demandez, et l’on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et l’on vous ouvrira. » (Matthieu 7,7-8). Or voilà soixante ans que le peuple papou frappe. Faut-il que l’Église universelle reste sourde à ce cri ?


Une responsabilité évangélique

Le respect du droit à l’autodétermination ne signifie pas nécessairement la séparation politique, mais il exige l’écoute sincère du peuple concerné. Pour les Papous, ce droit n’a jamais été respecté. Comme le soulignait saint Jean Chrysostome, « ne pas prendre part à la souffrance de son frère, c’est le trahir ». Si l’Église est vraiment sel de la terre et lumière du monde (Mt 5,13-14), alors elle ne peut pas se taire.

Les Églises chrétiennes, en particulier en Indonésie et dans le Pacifique, ont un rôle prophétique à jouer : dénoncer l’injustice, accompagner les victimes, plaider pour une solution juste et pacifique. Cela implique aussi d’examiner notre propre silence, nos compromissions, voire notre complicité.


Le temps de l’espérance active

La Papouasie occidentale est peut-être loin de nos regards, mais elle est proche du cœur de Dieu. Si un seul moineau ne tombe pas à terre sans que le Père le sache (Mt 10,29), combien plus un peuple tout entier, créé à Son image ?

À l’heure où le monde chrétien célèbre la résurrection, pouvons-nous demeurer indifférents au Golgotha vécu par nos frères et sœurs papous ? L’espérance chrétienne n’est pas une fuite spirituelle, mais un engagement actif pour que le Royaume de Dieu s’approche dès maintenant.

C’est pourquoi il est urgent que les Églises, les chrétiens, les consciences s’éveillent et agissent : pour que les Papous ne soient plus seuls à frapper à la porte. Que celle-ci s’ouvre enfin sur la justice, la paix, et la reconnaissance pleine de leur dignité.

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