Nationalisme indonésien et papou : quelle est la différence ?

Président Sukarno
Le premier président indonésien Sukarno (1945-1967) considérait que l'État de Papouasie occidentale déclaré le 1er décembre 1961 était une marionnette des Néerlandais et devait donc être dissous. Ce point de vue continue d'être perpétué dans les manuels scolaires indonésiens pour justifier l'annexion de la Papouasie occidentale à la République d'Indonésie. 

Pour moi, c'est plus qu'une fraude historique : c'est une insulte aux Papous indigènes ! Ce récit est construit comme si, dans les années 1960, les Papous étaient encore arriérés et ne pouvaient que obéir leurs maîtres coloniaux néerlandais. En réalité, l'indépendance de la Papouasie occidentale est le résultat de la lutte non-violente des nationalistes papous dans les années 1950. Parmi eux se trouvaient des universitaires de haut niveau : ceux qui avaient étudié à Harvard et à Leiden. 

Le nationalisme indonésien et le nationalisme papou sont deux choses différentes : tout comme les Indonésiens considèrent l'indépendance de la Papouasie occidentale comme un cadeau du gouvernement colonial néerlandais, les Papous considèrent également l'indépendance de l'Indonésie comme un héritage du régime fasciste japonais qui a occupé l'Indonésie pendant la Seconde Guerre mondiale. L'histoire montre que les fondements de l'État indonésien ont été formulés par des organisations parrainées par le Japon. Le texte de la proclamation d'indépendance de l'Indonésie, le 17 août 1945, a été rédigé à la résidence d'un officier de la marine Dai Nippone, Tadashi Maeda. Sur la photo de la proclamation d'indépendance indonésienne, on distingue clairement un homme en uniforme militaire japonais se tenant derrière Sukarno. Sur certaines photos, cette figure est volontairement effacée car elle est trop gênante. 

Proclamation de l'indépendance de l'Indonésie le 17 août 1945
Contrairement à l'indépendance de la Papouasie occidentale vis-à-vis des Pays-Bas, obtenue sans effusion de sang, l'indépendance de l'Indonésie vis-à-vis du Japon a été payée avec le sang et les larmes de nombreux civils innocents. 

Pour parvenir à l'indépendance, Sukarno n'a pas hésité à soutenir la campagne de l'armée japonaise visant à recruter des dizaines de milliers de travailleurs forcés et d'esclaves sexuels par l'appât de l'éducation. Sukarno lui-même a admis ce fait embarrassant dans un livre autobiographique écrit par la journaliste américaine Cindy Adams.

En effet, on ne peut nier que l'héritage du facisme japonais perdure encore aujourd'hui dans les habitudes de l'appareil juridique indonésien. Au nom de l'unité nationale, le régime indonésien autorise les violations des droits de l'homme. La police et l'armée indonésiennes sont redoutées pour leur cruauté. Elles sont connues pour être corrompues. Ils agissent selon les intérêts du régime dirigeant et recourent fréquemment à la terreur pour réduire l'opposition au silence. Aujourd'hui encore, en Papouasie occidentale occupée par l'Indonésie, la torture des détenus et le harcèlement sexuel par les forces de l'ordre se produisent en toute impunité.

La question est la suivante : les Indonésiens ont-ils le courage de voir les défauts de leur État ? Ou s'obstinent-ils à le voir à travers le prisme d'un nationalisme superficiel ? Combien de temps pourront-ils tolérer cette culture de la violence ? Une chose est sûre : tant que les Papous existeront, les efforts de libération de la Papouasie occidentale se poursuivront.


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