Famine en Papouasie : l’arme silencieuse du gouvernement indonésien ?

Famine en Papouasie : l’arme silencieuse du gouvernement indonésien ?

Jean Ziegler, ancien rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, affirmait que la faim est une arme de destruction massive dans le tiers-monde. À l’époque où la technologie agricole permettrait de nourrir toute la planète, il est clair : un enfant qui meurt de faim n’est pas une fatalité, c’est un meurtre.

C’est pourtant ce qui se passe aujourd’hui en Papouasie occupée par l’Indonésie.

Des milliers de Papous souffrent de la faim dans les montagnes, et des dizaines, dont beaucoup d’enfants, sont déjà morts. Ces morts ne sont pas accidentelles ni naturelles. Elles sont la conséquence directe et répétée de politiques étatiques délibérées.

Face à la situation, Jakarta joue l’autruche : il faut blâmer le mauvais temps, les mauvaises récoltes, le relief difficile… tout sauf sa responsabilité. Mais la famine en Papouasie n’est pas une nouveauté. Elle revient régulièrement, tant que l’État indonésien continuera à considérer les Papous comme des citoyens de seconde zone, voire des obstacles à son projet colonial.

Le rapport de la Fondation Pusaka, intitulé « Biopolitique des estates agricoles et dommages métaboliques chez les Papous », dévoile une réalité glaçante : sous couvert de « développement », le gouvernement indonésien impose un changement alimentaire forcé aux Papous. Le sagou, aliment traditionnel et fondamental, est remplacé par le riz. Les enfants papous sont conditionnés à préférer la nourriture instantanée aux aliments naturels issus de leurs jardins et rivières.

Les « estates alimentaires » ne sont pas seulement un échec, ils détruisent les forêts et les modes de vie indigènes. L’exploitation des ressources naturelles, souvent accompagnée d’opérations militaires intensives, transforme les territoires papous en zones de conflit. L’exemple de Nduga en 2018, où entre 60 000 et 100 000 civils ont été déplacés, est édifiant.

Si le gouvernement affirme que la plupart des déplacés sont rentrés chez eux, les ONG locales et les Églises dénoncent un mensonge. Le sort de ces populations reste incertain. Des centaines sont mortes. Malnutrition, insalubrité, absence de soins affaiblissent leurs défenses immunitaires, les rendant vulnérables aux maladies tropicales comme le paludisme et la dengue. L’espérance de vie à Nduga est de seulement 55 ans, contre 71 ans en moyenne pour le reste de l’Indonésie.

Cette famine n’est pas un accident : elle est voulue, organisée. Le summum de l’hypocrisie est atteint quand l’État indonésien collecte 50 tonnes de produits de première nécessité pour Gaza, mais ne consacre pas un dixième de cette aide à la Papouasie. L’Indonésie condamne haut et fort l’oppression des Palestiniens par Israël, mais refuse de regarder la réalité en face concernant son propre traitement des Papous.

Soyons clairs : il ne s’agit pas d’une erreur de politique publique. C’est un génocide lent, administré par la faim, la violence et le silence.

Si Jean Ziegler a raison, alors l’Indonésie n’est pas simplement coupable de négligence en Papouasie, elle est complice de meurtre.

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