Nous avons notre propre façon de nous exprimer

Chris Dogopia, activiste catholique Papou.

Profitant du beau dimanche au seuil de la nouvelle année, j'ai discuté avec Chris Dogopia, un jeune activiste catholique du diocèse de Jayapura, en Papouasie occupée par l'Indonésie.

Il y a trois ans, le 10 décembre 2020, Chris et ses amis exhortaient Mgr Leo Laba Ladjar, alors évêque de Jayapura, à prendre position en faveur des Papous indigènes, opprimés par le régime indonésien depuis six décennies. 

En effet, des violations flagrantes des droits de l’homme continuent de se produire et les catholiques indigènes papous se demandent souvent où était leur berger lorsqu’ils ont été persécutés et massacrés.

Bien que trois années se soient écoulées et que Mgr Leo soit désormais à la retraite, il n'y a toujours pas de position claire de la part du diocèse de Jayapura. "Nous avons notre propre façon de nous exprimer (pour s'adresser au gouvernement)", fut sa seule réponse.

Le témoignage de Chris sur l'apathie de l'évêque Leo est stupéfiant, comme le montre la vidéo YouTube suivante :

Nouvel évêque, nouvel espoir ?

Depuis le 2 février, le siège épiscopal de Jayapura est passé à Mgr Yanuarius You. Contrairement à ses prédécesseurs, Mgr You est originaire de Papouasie. Son ordination comme premier évêque papou en Indonésie a apporté l’espoir d’un changement radical. Car jusqu’à présent, les dirigeants de l’Église indonésienne n’avaient adopté qu’une approche douce envers les autorités, ce qui s’est révélé être un échec.

Malheureusement, l’euphorie a vite pris fin : le nouvel évêque papou n’a pas obtenu les progrès espérés. Malgré les appels de Mgr You à la protection des terres coutumières et à un cessez-le-feu dans les zones de conflit, il n'y a eu aucun changement significatif dans la vie quotidienne des Papous autochtones. Ces derniers sont encore plus marginalisés.

Avec Chris, j'ai essayé d'analyser cette triste situation et nous sommes arrivés à la conclusion que tant que les diocèses de Papouasie resteront sous la direction de la Conférence épiscopale indonésienne pro-gouvernementale, l'Église n'aura aucun moyen de défendre les droits des Papous indigènes, si ce n'est par une rhétorique absurde telle que "Nous avons notre propre façon de nous exprimer". 

Les appels moraux nécessitent une action audacieuse ! 

Dans les Évangiles, Jésus montre que la seule façon de défendre la justice est de parler haut et fort et d’agir de manière décisive. Cela se voit clairement lorsqu’Il chasse les marchands du Temple. Il est triste que les dirigeants de l'Église d'aujourd'hui imitent Ponce Pilate plutôt que Jésus-Christ.

Concernant la question de la Papouasie, nous sommes déçus non seulement par le diocèse de Jayapura, mais aussi par le pape François en tant que chef suprême de l'Église. Bien qu’en 2018 le pape François ait reçu un rapport de Franciscan International sur la tragédie humanitaire en Papouasie, à ce jour, il n’en a jamais parlé lors de son audience générale.

En fin de compte, ceux d’entre nous qui aspirent à la liberté et à la justice en Papouasie ne peuvent que prier pour qu’un leader religieux fort émerge pour briser le statu quo, défiant l’occupation indonésienne, comme l’a fait l’évêque Ximenes Belo au Timor Leste dans les années 1990. Nous souhaitons que le prochain pape soit noir et soit plus sensible à la défense de la cause papoue.

"Les Papous sont devenus une minorité dans leur propre pays. C'est très triste". 

(Père Frans Lieshout, OFM)

Face à l'injustice, l'Église ne peut rester neutre !

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