Indonésie 2024 : Les urnes ne sauveront pas la Papouasie

 

Indonésie 2024 : Les urnes ne sauveront pas la Papouasie

L’élection de Joko Widodo, alias Jokowi, à la présidence de l’Indonésie en 2014 avait suscité de nombreux espoirs, notamment en Papouasie. Pour la première fois, un président n’appartenait pas aux élites militaires ou oligarchiques du pays. Certains pensaient qu’un vent nouveau soufflerait enfin sur la Papouasie occupée depuis 1963. Jokowi promettait une approche humaniste, des réformes, du dialogue. Mais une décennie plus tard, il faut appeler un chat un chat : Jokowi a trahi.


Jokowi : espoir trahi, promesses bafouées

Présenté comme un “Obama indonésien”, Jokowi aura multiplié les déplacements en Papouasie — plus d’une douzaine — mais ces visites n’ont été que de la poudre aux yeux. À l’heure du bilan, rien n’a changé. Pire : la militarisation s’est accrue, la répression s’est intensifiée, et le dialogue reste inexistant.

Toutes ses grandes promesses ont été trahies :

  • Aucune enquête sérieuse sur les violations des droits humains perpétrées par l’armée.
  • Aucun accès garanti pour les journalistes internationaux.
  • Aucune négociation réelle avec l’ULMWP, représentant pacifique des aspirations indépendantistes papoues.

Et surtout : toujours aucun feu vert pour une visite du Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme.


Papous : citoyens de seconde zone dans leur propre terre

Alors que l’Indonésie se prépare à une nouvelle élection présidentielle, la Papouasie redevient un thème de campagne, un objet de débat, une marchandise politique. Depuis soixante ans, les Papous sont utilisés comme toile de fond pour le théâtre électoral javanais. Et depuis soixante ans, leur sort ne change pas : pauvreté, militarisation, racisme systémique, spoliation des terres, destruction culturelle.

Prabowo Subianto, Ganjar Pranowo, Anies Baswedan : trois visages différents, un même système. Le système colonial indonésien.


Une jeunesse papoue lucide et sans illusions

Un jeune Papou l’a dit avec force : « Peu importe qui sera président, tant que ce sera sous l’Indonésie, les Papous resteront malheureux. Tous utilisent la même méthode : la guerre. »

Même les militants indonésiens des droits de l’homme sont sceptiques. Veronica Koman, avocate engagée pour la cause papoue, pense que Prabowo aggravera la situation, que Ganjar perpétuera le statu quo, et qu’Anies — bien que plus progressiste — reste une énigme peu convaincante.


Ambrosius Mulait : une parole de vérité papoue

Le militant papou Ambrosius Mulait, connu sous le nom d’Ambros, résume la situation sans détour : « Anies, Prabowo, Ganjar, arrêtez de faire des Papous une marchandise pour vendre votre politique. C’est hypocrite. Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas de vos élections coloniales, mais de la reconnaissance de notre indépendance ! »


Pas d’alternative sous l’occupation

À ceux qui croient encore que les élections indonésiennes changeront le destin des Papous, il faut répondre franchement : il ne peut y avoir de justice sans liberté. Il ne peut y avoir de paix sous la colonisation. Il ne peut y avoir de démocratie sur les ruines d’un peuple opprimé.

Les Papous ne demandent pas la charité. Ils réclament la dignité. Leur terre. Leur voix. Leur droit à l’autodétermination. Tant que ce droit sera refusé, chaque urne sera une mascarade. Et chaque président, un nouveau masque d’un vieux système.

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