Papouasie occidentale : la tragédie continue

Comparées au conflit actuel entre le Hamas et Israël à Gaza et à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le drame des Papous occidentaux ne semblent pas aussi grave que celui des Palestiniens et des Ukrainiens. 

Mais en réalité, les crimes commis par l’État indonésien contre les papous depuis 1963 sont bien pires. Au cours des six dernières décennies, Jakarta a lancé une vingtaine d'opérations militaires entraînant la mort d'environ 500 000 Papous. Actuellement, il existe environ 75 000 réfugiés internes en Papouasie occidentale et 50 000 réfugiés à l'étranger, notamment en Papouasie-Nouvelle-Guinée voisine. 

Lentement mais sûrement, le gouvernement indonésien nous élimine sur notre propre terre ancestrale à travers les sept politiques suivantes : 

1. Expropriation de terres, sécurité des projets stratégiques nationaux, construction de routes et d’infrastructures de défense pour l’armée indonésienne, torture et exécutions extrajudiciaires de civils par les forces de sécurité en toute impunité. 

2. Criminalisation et terreur contre les personnalités politiques, religieuses et traditionnelles papoues, les militants des droits humains ainsi que les journalistes indépendants. En Papouasie occidentale, le racisme est institutionnalisé et les droits fondamentaux des autochtones sont bafoués. La liberté d'expression est quasi inexistante. 

3. Contrôle indonésien total sur le gouvernement régional. Les fonctionnaires papous sont supervisés par l'armée, la police et les services de renseignement indonésiens. L'autonomie accordée par l'ancien président Abdurrahman Wahid en 2001 a été révisée par la nouvelle loi d'autonomie spéciale OTSUS 2, adoptée en 2022. La politique du « diviser pour mieux régner » a été mise en œuvre par le biais de nouvelles régions autonomes créées unilatéralement par Jakarta. 

4. Marginalisation démographique : le nombre de résidents indonésiens venant de l'extérieur de la Papouasie continue d'augmenter. L'Assemblée populaire papoue et le Conseil représentatif régional sont de plus en plus dominés par des non-Papous. 

5. Censure et désinformation : Presque tous les médias de communication visuels, imprimés et numériques sont contrôlés par le gouvernement indonésien. La couverture médiatique de la Papouasie dans les grands médias indonésiens n’est qu’une version unilatérale de Jakarta. 

6. Appauvrissement systématique des Papous : les investisseurs et entrepreneurs indonésiens et étrangers bénéficient d'une certaine commodité, tandis que les prêts bancaires aux entrepreneurs papous sont rendus difficiles. L'économie traditionnelle est remplacée par une économie de marché. Les droits fonciers coutumiers sont ignorés. Dans le domaine de la santé, les mauvaises pratiques sont fréquentes, depuis le contrôle forcé des naissances jusqu'à l'avortement criminel. Le taux de sida en Papouasie est le plus élevé d'Indonésie, tout comme les taux de mortalité maternelle et infantile, le retard de croissance et les épidémies de paludisme. De nombreux décès prématurés sont dus à des intoxications alimentaires et à des médicaments périmés. La drogue et l'alcoolisme sont répandus parmi les jeunes Papous. Dans le domaine de l'éducation, il existe des restrictions et des suppressions arbitraires des bourses pour les étudiants papous à l'étranger. L'infrastructure de l’éducation est loin d’être adéquate : selon les données de 2023, 693 000 enfants dans toute la Papouasie occidentale ne sont pas scolarisés !

 7. Exploitation folle des ressources naturelles : Déforestation massive, la forêt papoue est passée de 34 millions d'hectares à seulement 15 millions d'hectares. L'écosystème de Papouasie occidentale a été détruit par l'industrie agro-alimentaire et minière, comme le projet stratégique national de Merauke qui a consommé 2 millions d'hectares de forêt, la société Freeport qui gère la plus grande mine du monde à Grasberg, le plan minier Wabu Block, Raja Ampat Regency Nickel, et bien d'autres encore. 

La Papouasie occidentale est la seule zone de conflit en Indonésie qui n’a pas reçu d'attention internationale sérieuse. Pas autant que le Timor oriental (1975-1999) qui a obtenu son indépendance en 2002 grâce à l'intervention de l'ONU, ou qu'Aceh (1950-2005) qui a signé une résolution de paix avec le gouvernement indonésien en 2005 grâce à la médiation finlandaise. 

Face aux actions meurtrières du gouvernement indonésien, nous, Papous, continuons de nous demander : " Jusqu'à quand la communauté internationale va-t-elle nous ignorer ? " Combien cette indifférence est honteuse, car nous, Papous, sommes actuellement confrontés à de graves menaces de génocide, d’ethnocide et d’écocide. D’ici trente ans, nous, deux millions de Papous occidentaux, risquons de périr sous la domination indonésienne ! 

Markus Haluk

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